Providence de Dieu était une chaloupe construite en 1910 à Douarnenez pour le compte de François Salaun de Plouhinec (29). Inscrite au quartier d’Audierne sous le n° A508 elle fut francisée à Audierne le 8 novembre 1911. D’une jauge brute de 14,78 tx c’était une chaloupe capable d’évoluer à bonne distance des côtes pour s’adonner aux diverses pêches locales, sardines, maquereaux, raies et autres poissons…Le 29 décembre 1910 elle est acquise par Henri Cabillic de Poulgoazec (Plouhinec) qui en sera le patron.

Le 1^er avril 1917, un dimanche, Providence de Dieu est en pêche, avec trois autres bateaux d’Audierne dont Jolie Brise et MSRDF dans le sud de l’île de Sein à environ 8 milles. Vers 18h00 les pêcheurs de Poulgoazec voient surgir une embarcation munies de deux voiles, et ce qu’ils prennent pour un voilier s’avère être un sous-marin qui, sans sommation, ouvre aussitôt le feu au canon sur Providence de Dieu et Jolie Brise les deux bateaux les plus proches.

Les deux autres chaloupes larguent vite leurs engins de pêche, et profitant d’une ondée, et aussi du fait qu’une goëlette, est en approche, prennent la fuite vers Audierne.

Le bilan sera hélas terrible, les deux chaloupes coulées avec leur équipage, 11 morts sur Providence de Dieu, 9 morts sur Jolie Brise. Le nombre élevé de membres d’équipage s’explique par le fait qu’à cette époque tout le travail se faisait à la main, il fallait de nombreux bras pour remonter les filets qui étaient souvent bien garnis. A terre le bilan sera non moins terrible car ce sont 13 veuves et 61 orphelins dont 60 de moins de 16 ans qui vont se retrouver sans ressources.

L’auteur de cet acte inqualifiable que l’on peut assimiler à de la piraterie était l’oberleutnant Zur See Harald Von Keyserlingk avec son sous-marin UB-36.

Ce tragique évènement qui a endeuillé le port de Poulgoazec et fait grand bruit dans toute la Cornouaille sud ne fut pas sans répercussion sur l’état d’esprit des pêcheurs. En effet, les autorités maritimes avaient décidé, en 1917, d’encourager l’effort de pêche au maquereau et pour ce, d’armer les bateaux de canons pendant la campagne qui se pratiquait à une quarantaine de milles au large, hors de portée des défenses côtières. Certains bateaux avaient commencé à s’armer avant ce fatidique 1^er avril 1917, mais les jours d’après, revirement total, les pêcheurs refusent d’armer leurs embarcations, prétextant que le canon les gênerait dans leur travail. Il est évident que la marine allemande avait également eu vent de cet armement en canons qui leur donnait prétexte à accomplir leurs forfaits envers les pêcheurs. La peur, justifiée et bien compréhensible, a donc aussi joué car tous ces pêcheurs étaient pères de familles nombreuses. Ils se sont alors tournés vers la sardine, pêche côtière et moins risquée ce qui explique que la saison du maquereau fut compromise en 1917. A noter que le 2 juillet 1918 ; deux chaloupes douarnenistes subiront le même genre d’attaque sauvage dans les parages d’Ouessant.

L’équipage de Providence de Dieu était composé de Henri Cabillic : patron, Jean Arhan, Pierre Burel, Louis Canevet, François Claquin, François Corre, Jean-Yves Le Bis, Louis Pezennec, François Salaun : matelots, Yves Corre novice et le mousse François Cabillic.

Les 9 hommes de Jolie Brise sont : Vinoc Bourhis : patron, Jacques Le Dem, Yves Le Moal, Yves Le Moign, François Lossy, Jean-Marie Moalic, Daniel Trividic, Yves Violant : matelots, et Yves Violant novice.