Michel Marie Corolleur
est né le 30 avril 1893 à Molène (Finistère (29))
Fils de Jules, né le 11 octobre 1855 à Landunvez, forgeron, et de Marie Ambroisine Désirée Gouachet, née le 2 novembre 1856 à Molène, Michel naît au domicile familial sur l’île de Molène le 30 avril 1893.
Il est le troisième enfant du foyer ; l’aînée, Marie, est née en 1891, la cadette, Ambroisine, en 1892.
Très rapidement, le malheur frappe la famille, Jules décède le 16 août 1893, son épouse le lendemain et Ambroisine le 19. L’île est victime d’une épidémie de choléra, la mortalité s’élèvera à 71 décès en 1893, ce qui révèle l’ampleur du traumatisme îlien.
Les deux jeunes orphelins sont accueillis au foyer de la famille Gouachet.
Michel suit sa scolarité sur l’île et se destine tout naturellement au métier de marin pêcheur. Il est inscrit maritime provisoire le 1er juin 1905 et embarque comme mousse puis novice à bord des bateaux de pêche « Météore » et « Deux sœurs ».
Inscrit définitif (matricule : 3271 Le Conquet), il pratique la petite pêche à partir du 1er mai 1911 à bord du « Deux sœurs » en qualité de matelot léger.
Il est ensuite matelot léger à bord du caboteur « Saint-Charles » en 1912, du quatre-mâts « Europe » au long cours en 1913 puis matelot à bord de la goëlette « Mésange » au cabotage.
Michel est incorporé au 2ème dépôt des équipages de Brest le 10 janvier 1914 pour effectuer ses classes. Il suit une formation de spécialité à l’école des mécaniciens de Toulon puis est affecté à bord du croiseur « d’Entrecasteaux » à Lorient le 1er août 1914, du cuirassé « Henri IV », du croiseur-cuirassé « Amiral Aube » puis du croiseur « Gueydon » à Cherbourg en 1918.
Il est décoré de la croix de guerre 1914/1918 et de la médaille commémorative de la guerre 1918/1921, attribuée par l’attaché militaire à l’ambassade de Pologne.
Libéré de ses obligations militaires le 23 mai 1919, il est, par ordre spécial de mobilisation, maintenu à la disposition de la compagnie française d’armement et d’importation de nitrate de soude jusqu’au 1er juillet 1919.
Il embarque ensuite au long cours sur le quatre-mâts « Valparaiso » mais revient rapidement à Molène où il embarque comme matelot à la petite pêche sur l’«Eglantine».
Marie Augustine Léocadie Masson, née le 18 août 1898 à Molène, devient son épouse le 25 mai 1920. De leur union, naîtront dix enfants : Alix (1921/1976), Marie (1922/1998), Juliette (1924/1989), Micheline (1925/2004), Alfred (1928), Jeanne (1931/1978), Jean (1933), Cécile (1935), Antoinette (1936) et Henri (1937/2005).
Michel est nommé, à défaut de candidat militaire classé, gardien de phare de 4ème classe et attaché dans le département du Finistère au service du phare de Kéréon (« pierre hargneuse » en breton), entre Ouessant et Molène, sur le passage du Fromveur. Il occupe cette fonction d’août à novembre 1920.
A nouveau, il retourne à la petite pêche et navigue à Molène comme matelot, entre novembre 1920 et octobre 1927, à bord de « l’Eglantine », du « Maréchal Foch » et du « Notre-Dame du port ».
Après avoir obtenu le certificat de capacité de pêche en juillet 1925 et celui de moteur en mars 1928, il devient patron de pêche sur la « Reine du ciel » du 7 novembre 1927 au 11 janvier 1931 puis sur le « Lotus bleu » du 27 mars 1931 au 18 juin 1940.
Parallèlement à ses activités professionnelles, Michel occupe des fonctions très importantes au sein de la société centrale de sauvetage des naufragés (SCSN) de l’île. Il est de 1921 à 1928, sous-patron du canot de sauvetage « Coleman » puis patron de 1929 à 1938 ; patron du canot de sauvetage « Jean Charcot », de 1939 à juin 1940.
Il effectue de très nombreuses sorties en mer pour arracher aux écueils de l’archipel de Molène les naufragés, pas moins de 91 sorties et plus de 200 vies humaines sauvées, risquant constamment la sienne et celles de ses camarades de la SCSN.
Son courage, son abnégation, son sens du devoir sont cités en exemple et il est nommé, en juillet 1936, chevalier dans l’ordre du Mérite Maritime. Durant ces années au service du sauvetage en mer, il obtient également 18 médailles (bronze, argent, vermeil, or) qui récompensent cet exceptionnel marin.
Deux mentions honorables sont par ailleurs inscrites dans son dossier matriculaire pour :
- le sauvetage du dundee « Gafsa » le 17 septembre 1935 ;
- le dévouement dont il a fait preuve en se portant la nuit, par violente tempête, au secours d’embarcations en détresse le 19 février 1936.
Le 19 juin 1940 à 18 heures, avant le premier départ des pêcheurs de l’île de Sein, le canot de sauvetage « Jean Charcot » quitte l’île avec à son bord son patron, Michel Corolleur, son fils aîné Alix âgé de 18 ans, le fidèle et courageux mécanicien Pierre Coëffeur et sa famille ; au total, 23 personnes dont quelques militaires en garnison au sémaphore. Ils arrivent aux îles Scilly le 20 où l’accueil est des plus chaleureux puis le lendemain à Flamouth (Angleterre), rempli de vaisseaux de guerre sous pavillon tricolore. La flotte française, réfugiée là sans gloire, les reçoit fort mal et les accuse de toutes les lâchetés. Elle les invite à retourner d’où ils viennent mais les jeunes gens refusent et menacent de se jeter à l’eau si on les y oblige, de gagner à la nage les cargos qui n’ont rien à voir avec cette « Royale » si peu conciliante (extrait des « Clandestins de l’Iroise 1940/1944, récits d’histoire, tome 6 » de René Pichavant). L’équipage retourne aux îles Scilly.
Une semaine plus tard, il embarque à Penzance sur le « Rouanez-ar-Mor » de l’île de Sein où, affecté au service des pêches, il participe au ravitaillement des forces navales françaises libres. Pas très longtemps, car il rejoint ensuite Londres où il suit des cours durant plusieurs heures par jour pour se préparer à des missions sur les côtes bretonnes au profit du service de renseignement. Il n’en effectuera finalement aucune et retournera servir au service spécial du deuxième bureau à Penzance.
Durant ces années, il correspond par courrier avec sa famille par l’intermédiaire de la Croix-Rouge internationale et parvient à donner quelques nouvelles par celui de la T.S.F.
Le 22 janvier 1942, Michel est admis à l’hôpital militaire des forces françaises libres de Penzance où il décède le 12 mars suivant.
Ses obsèques sont grandioses à l’image de l’homme qu’il était, apprécié de tous, en présence de nombreuses autorités civiles et militaires. Son corps sera inhumé à Penzance dans un premier temps puis exhumé, remis aux autorités militaires françaises et restitué à la famille le 18 janvier 1949 après une cérémonie militaire à Brest où un vibrant hommage lui est rendu.
Le cercueil est ensuite conduit au port de commerce où il est déposé sur « son » « Jean Charcot » puis acheminé vers l'île. Le déplacement exceptionnel du canot de sauvetage est effectué à la demande de la municipalité molénaise.
Après la traditionnelle veillée funéraire, les obsèques sont célébrées le 19 janvier 1949 dans l’église paroissiale Saint-Ronan et Michel Corolleur est inhumé sur son île.
Alix Corolleur s’est, pour sa part, engagé dans les forces navales françaises libres et embarque sur les sous-marins « Junon », « Minerve » et « Doris ». Il retrouve son île natale à la fin de la guerre où Jean, son jeune frère, a bien du mal à le reconnaître à l’arrivée du bateau au port.
Le canot de sauvetage « Jean Charcot » est rentré d’Angleterre en juin 1945.
L’an précédent l’entrée en guerre, Léocadie Corolleur s’est vu remettre la médaille d’or de la famille française.
Elle a conseillé à son époux de faire son devoir et c’est avec courage, grandeur et dignité qu’elle s’occupe de ses 9 enfants durant le conflit mondial. Elle supporte mille difficultés pour subvenir aux besoins des siens et elle y parvient avec l’aide de son frère, Etienne Masson, maire de l’île et, bien sur, la considération de tous les îliens solidaires. Le rôle de soutien de famille est dévolu à Alfred, tout juste âgé de 13 ans et qui vient de terminer sa scolarité en obtenant son certificat d’études.
Au milieu des ses soucis, elle trouve malgré tout le temps et le courage de se consacrer à la Résistance et est chargée de transmettre sur Brest de fausses cartes d’identité confectionnées en mairie de Molène et destinées essentiellement aux aviateurs alliés de son réseau « Jade-Fitzroy ».
Par lettre de l’attaché militaire de l’Ambassade des Etats-Unis d’Amérique à Paris, le peuple américain a tenu à lui exprimer sa gratitude pour sa contribution à la cause alliée pendant l’occupation ennemie. Son aide envers les combattants américains tombés en France lui a valu l’estime et la reconnaissance du gouvernement des Etats-Unis.
Lors des premières élections municipales ouvertes à toutes et à tous en 1946, elle est élue conseillère et deviendra ensuite adjointe au maire. Le général De Gaulle lui écrira : « J’ai eu connaissance du dévouement avec lequel vos enfants et vous-même avez pris part, dans votre commune, à notre campagne de salut public. Cette marque de sympathie m’a d’autant plus touché qu’elle me venait d’une famille de Français Libres, celle de mon glorieux compagnon des F.N.F.L. Michel Corolleur. Je tenais à vous en remercier personnellement. » Elle occupera ces fonctions durant un mandat d’une durée de 6 ans.
Léocadie s’en est allée rejoindre Michel le 11 juillet 1968.
- Croix de Guerre 14-18
- Médaille du Mérite maritime (chev.)
- Médaille commémorative des services volontaires dans la France libre
- Médaille commémorative de la Grande Guerre
Forces françaises libres
Les Français libres
En juin 1940, la France est défaite, les forces allemandes entrent dans Paris, déclaré ville ouverte. Des millions de réfugiés errent sur les routes bombardées par les stukas allemands. Le maréchal Pétain, nouveau chef de gouvernement, réfugié à Bordeaux, demande, le 17 juin, aux Français de cesser le combat. En quelques heures, les...