Auguste, Stanislas CAILLY
est né le 04 octobre 1891 à Lorient (Morbihan (56))
C’est le fils de Stanislas Annibal Cailly, quartier-maître de mousqueterie, né à Gorenflos, petit village de la Somme, et de Marie Claudine Cheny, lingère, originaire de Lambézellec aujourd’hui quartier de la ville de Brest.
L’enfant vient au monde un quart d’heure après Marie Louise, sa jumelle. Avant eux sont nés Madeleine Aimée en 1889, et Henri Auguste Arthur en 1890. Marguerite Paule, née en 1894 à Lorient également, viendra clore la fratrie.
La famille réside rue du port, au cœur de Lorient. La ville, la plus peuplée du Morbihan, tire son nom de "Soleil d’Orient" premier navire construit dans les chantiers de la "Compagnie française des Indes orientales" en 1669. L’économie de la ville, cité portuaire active, est tournée vers la mer, qu’il s’agisse de la construction navale, de la marine Nationale, de la pêche.
Quand naît Auguste Stanislas, le train rallie Paris à Lorient depuis près de 30 ans, au prix toutefois d’une vingtaine d’heures de voyage permettant à la ville de relancer ses activités. La ville, qui compte plus de 42 000 habitants, a associé des conserveries à la pêche, et la réparation navale à la construction.
Marie-Claudine, la maman, a cessé de travailler après la naissance des jumeaux, d’autant plus que Stanislas Annibal, le papa, reste officiellement rattaché à la "base de Cherbourg". Elle peut désormais leur consacrer tout son temps.
Nul doute que les enfants aient disputé de nombreuses parties de jeux, et connu une enfance animée, dans ce quartier ouvrier qui a vu affluer de toute la région des populations en quête de travail. Les camarades y sont nombreux.
La ville ne cesse de se développer, trois ans plus tard le tram permet de sillonner la ville, Paris n’est plus qu’à 13h de train.
Et quel émerveillement d’admirer l’arrivée ou le départ des grands voiliers, surtout lorsque l’on a un papa marin !
Comme ses frères et sœurs, Auguste Stanislas débutera sa scolarité à Lorient, sans doute dans un établissement proche de chez lui.
Mais les embarquements de son père Stanislas sont de plus en plus longs, et sa famille maternelle manque à Marie Claudine, désormais mère de 5 enfants. Orpheline très jeune, elle a bénéficié du soutien et de l’affection de Marie Catherine Le Berre, la sœur de sa maman, qui vit à Brest avec son mari Jean Marie Perret.
A partir de février 1897, la famille vient s’installer rue Keruscun, à Brest, pas très loin sans doute de la famille Perret, qui ne quittera pas cette partie de Brest. Leurs enfants, Jules et Louis Prosper, sont déjà grands, Jules a choisi les Ponts et Chaussées, Louis Prosper la marine.
Nul doute qu’ils aient accueilli avec joie l’arrivée de la petite famille Cailly.
Et quel soulagement pour Marie Claudine : son mari pose désormais son sac à bord des grands croiseurs, et à peine sont-ils brestois qu’il embarque sur le "Jaureguiberry" pour 19 mois !
De la rue Kéruscun, Auguste Stanislas a sans doute souvent dévalé l’espace qui le sépare du port. Quelle joie de voir les grands navires passer le Château, lorsqu’ils entrent dans la rade ! Quel spectacle de voir s’ouvrir le pont tournant, cadeau de Napoléon III à la ville, qui permet tout à la fois aux navires d’entrer à l’abri dans la Penfeld, et aux Brestois de passer en sécurité d’une rive à l’autre !
A l’étroit dans ses fortifications, Brest s’est étendue à l’extérieur après l’arrivée du train, en 1865, et la population s’est beaucoup développée entre le château et Saint-Martin, dans la zone d’habitation de la famille Cailly. Les enfants n’y manquent pas de compagnons de jeux, et Auguste Stanislas doit s’y plaire.
Mais sa jeune vie est bientôt endeuillée. Alors qu’il vient d’avoir 8 ans, en octobre 1899, il perd sa maman âgée de seulement 32 ans. A ce moment, son papa est en mer, et ne pourra rentrer que plus tard, bénéficiant d’une disponibilité de 11 jours pour se consacrer à ses enfants.
Au recensement de 1901, le père et les enfants ont quitté la rue Keruscun.
Stanislas Annibal restera au "dépôt de Brest" jusqu’en juin 1901, date à laquelle il embarque sur le navire la "Nive", navire transport de troupes, qui conduit des renforts en Chine à l’occasion de la guerre des Boxers. Il est second maître fusilier-marin, et son action à cette occasion lui vaudra la médaille de Chine, attribuée par la Chancellerie.
Stanislas Annibal a repris les embarquements, pour des durées plus brèves toutefois, lorsque, âgé d’à peine 40 ans, il meurt le 26 février 1904 d’une méningite tuberculeuse à l’hôpital maritime de Lorient, maladie contractée alors qu’il était en mission sur le "Bélier". Ses enfants, doublement orphelins, deviennent pupilles de la Nation.
Leur adresse est désormais celle de leur tuteur, au 25 rue de Carnel à Lorient. Mais la mer continue de hanter le jeune Auguste, qui entrera bientôt à l’"Ecole des Pupilles", à Brest, devenue sa ville. Les journées y sont particulièrement bien remplies, ainsi que le montre un film d’archives : lever matinal, exercice physique, scolarité assidue, et préparation «au plus dur mais au plus beau des métiers », celui de marin.
Le 10 juillet 1906, à l’âge de 14 ans, il arrive au corps comme mousse, avec la mention «provenant des pupilles» avant de signer comme engagé volontaire à la mairie de Brest le 18 octobre 1907, suivant en cela l’exemple de son père et de son cousin. Il vient d’avoir 16 ans.
Un an plus tard, le 22 octobre 1908, un troisième deuil le frappe : sa sœur aînée, Madeleine-Aimée, ouvrière à Lorient, est décédée à l’hôpital Bodelio à seulement 19 ans. Loin des siens, Auguste-Stanislas a dû se sentir bien seul. Peut-être ses cousins brestois ont-ils eu l’autorisation de le réconforter ?
Dès son arrivée au corps au 1er mars 1909, l’adolescent embarque à bord du navire-école "Bretagne", d’abord mousse, puis novice, et enfin apprenti-marin. On le retrouve ensuite durant 4 mois à bord du "Magellan", autre navire-école destiné à la formation des mousses, puis, le 4 octobre de la même année, embarqué à bord du Tourville, qui fait fonction à Toulon d’école des canonniers.
C’est désormais en tant que matelot que le jeune homme embarque pour une année à bord du croiseur "Alger", navire proche de la retraite. Il est prêt cette fois à naviguer, et après un court répit passé au "dépôt de Brest", monte le 12 janvier 1911 à bord du cuirassé "Condorcet", nouveau bâtiment construit aux chantiers de Saint-Nazaire, et mis à flot depuis peu, afin de procéder aux essais d’usage. Ce navire de 18 318 tonnes et d’une vitesse supérieure à 19 nœuds sera affecté à la première escadre, et accueillera par la suite à son bord le commandant François Drogou, compagnon de la libération, puis les explorateurs océanographes Philippe Tailliez et Jacques-Yves Cousteau.
Auguste Stanislas débarquera du "Condorcet" le 1er mars 1912, après avoir participé en septembre 1911 aux grandes manœuvres navales à bord du cuirassé en tant que matelot de 1ère classe.
Après une affectation de 5 mois au "dépôt de Toulon", le jeune matelot embarque le 1er août 1912 à bord du cuirassé "Danton", du même type que le croiseur "Condorcet" mais construit à l’arsenal de Brest, et mis à l’eau un an plus tôt. Torpillé en 1917, le "Danton" aura vécu le 17 février 1913, alors qu’Auguste Stanislas était encore à bord, un événement dramatique : alors que la Première armée navale prépare dans les salins d’Hyères les exercices de tir devant saluer l’entrée à l’Elysée du nouveau Président Poincarré, une tourelle éclate, tuant trois marins, et en blessant d’autres. L’émotion est vive, et le 18, lors de l’événement annoncé, les drapeaux restent en berne.
Le 19 avril 1913, Auguste Stanislas quitte le "Danton" et après avoir été breveté canonnier rejoint le 1er juillet de la même année le croiseur cuirassé "Léon-Gambetta", également basé à Toulon. Le croiseur, rentré depuis deux mois des guerres turco-balkaniques, patrouille à cette période entre Toulon et Bizerte.
En juillet 1914, à la tête de la "seconde division légère", le bâtiment participe aux manœuvres associées.
Le 1er août, la mobilisation générale est décrétée.
Le 3 août 1914, c’est la guerre, et l'armée navale "en ordre de marche" quitte Toulon pour Bizerte, avant de gagner l'Adriatique, où l’Autriche-Hongrie a des ports. L’ennemi évite le combat, et le choix est fait de bloquer le canal d’Otrante, afin d’empêcher la jonction avec les Dardanelles.
Le "Léon-Gambetta" participe avec d’autres cuirassés à ces croisières, qui, en avril 1915, vont de Santa Maria di Leuca à l’île Sainte-Maure. Le charbonnage se fait dans l’une des îles de la côte grecque, que ce soit Zaverda, Dragamesti, Navarin, avec, tous les 30 ou 40 jours, une pause bienvenue à Malte.
Dans la nuit du 26 au 27 avril, le cuirassé "Léon-Gambetta", qui occupe l’espace oriental de la croisière, effectue sa dernière ronde avant de se rendre à Malte passer quelques jours de repos, lorsque sa route croise celle du sous-marin autrichien "U5". Cassé en deux par les deux torpilles qu’a lancées le sous-marin en immersion, le croiseur cuirassé bascule et disparaît dans les flots le 27 avril 1915 à 00.45min
Six-cent-quatre vingt-quatre officiers, sous-officiers et hommes d’équipage y laisseront la vie.
Le matelot de 1ère classe Auguste-Stanislas Cailly fait partie des 624 disparus.
Il n’avait que 23 ans.
Il est titulaire de la médaille militaire, et de la croix de guerre 14/18 avec palmes
- Médaille Militaire
- Croix de Guerre 14-18 avec étoile (s)
Léon Gambetta
Le "Léon Gambetta", construit à l'arsenal de Brest (29), était un navire d’une longueur de 146,50m, une largeur de 21,40 m au maître-bau, un tirant d’eau de 8,20 m, il avait un déplacement de 12600 tonnes. La propulsion était assurée par 3 machines à vapeur regroupant 28 chaudières qui assuraient une puissance de 28500 cv.
Le "Léon Gambetta" pou...