Maori - Cargo

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 Le "Maori", était le prototype d'une série de 10 cargos d'un tonnage de 9300 tonnes. La silhouette de ces navires aux lignes magnifiques se distinguait de celle de leurs prédécesseurs (la série des 8300 tonnes) par une longue teugue. Les cinq premiers d'entre eux, les "M", étaient destinés aux lignes d'Extrême-Orient tandis que les suivants, les "V", devaient être affectés au service sur l'Australie. Il s'agissait des cargos du type G, "Maori" (1958),"Marquisien" (1958), "Malais" (1959), "Mauricien" (1959), "Martiniquais" (1959) ainsi que ceux du type "H", "Vivarais" (1959), "Vanoise" (1960), "Vosges" (1960), "Ventoux" (1960) et "Velay" (1961).

Les premières tôles du "Maori" seront mises sur cale le 10 février 1958. Lancé le 29 juin 1958, son entrée en flotte eu lieu le 30 décembre 1958. Le 6 janvier 1959 il appareilla de Dunkerque pour son voyage inaugural à destination de Tahiti et de la Nouvelle Zélande via le canal de Panama. La totalité de sa carrière se déroula en alternance sur les lignes du Pacifique Sud et d'Extrême-Orient jusqu'à ce qu'elle soit tragiquement interrompue.

   Ces navires étaient des cargos à shelter-deck pouvant être exploités à des vitesses jugées importantes pour l'époque, la vitesse maximale continue de 19,5 nœuds devait ainsi autoriser une vitesse d'exploitation d'environ 18 à 18,5 nœuds. De nombreux essais sur modèles, réalisés au bassin d'essais de Paris et aux Pays-Bas, allaient permettre de déterminer la meilleure forme compatible avec les dimensions retenues et les exigences de vitesse. Lors des essais en mer du "Maori" une vitesse de 20,5 nœuds sera obtenue sans vibrations.

Caractéristiques principales:

Longueur entre perpendiculaires : 146,00 m Largeur hors membres : 19,70 m  Creux au pont shelter : 11,90 m Creux au pont principal : 9,25 m Tirant d'eau : 7,90 m Port en lourd : 9300 tonnes Longueur hors tout : 155,91 m Déplacement à pleine charge : 15260 tonnes

Le "Maori" avait appareillé de Nouméa le 9 octobre 1971 avec un chargement de mattes et de lingots de nickel, il avait ensuite escalé à Papeete le 15 octobre pour charger 1003 t d'huile de coprah. Après une traversée sans histoire du Pacifique, il emprunte le canal de Panama et fait escale à Cristobal (Panama) pour souter. Le 29 octobre, appareillage vers l'Europe et Le Havre où il était attendu le 10 novembre. Le "Maori" devait à l'origine transiter par Baltimore (USA) pour décharger une partie de sa cargaison de nickel mais une grève des dockers américains fit annuler cette escale. Le "Maori" avait été vu pour la dernière fois au point K (45° N / 10° W) le 8 novembre par la frégate météo "France I". A partir de ce jour temps se gâte, mais reste encore maniable pour un bateau de la taille du "Maori", vent de force 6, creux de 4 à 5 m. Le lendemain 9 novembre à 4h20 GMT, la situation devient critique, le cargo des Messageries qui accusait 15° de gîte a vu cette dernière passer à 30 puis 45°. Un SOS est lancé car il menace sérieusement de chavirer. La préfecture maritime de Brest fait décoller un Bréguet Atlantique à 7h45 qui sera sur zone à 9h30, et commencera les recherches en effectuant des rotations de plus en plus resserrées jusqu'à découvrir à 11h00, parmi divers débris dont une chaloupe retournée, des marins flottant à la surface de l'eau. Aucune trace du "Maori" qui a du couler dans l'intervalle de temps. Le Bréguet largue alors un canot de sauvetage pneumatique auto-gonflable, et constate que seul un marin parvient à s'y hisser ce qui laisse supposer que les autres marins à la mer sont trop faibles ou déjà morts.

A 12h30 le cargo allemand "Vegesak", est le premier arrivé sur les lieux et recueille aussitôt, le lieutenant mécanicien Jean-Yves Duclaux qui, hélas sera le seul rescapé de ce terrible drame. Treize corps seront repérés par le cargo allemand mais l'état de la mer ne permettra pas de les repêcher. Quelques jours plus tard 4 corps seront récupérés par un cargo norvégien et un dernier par un chalutier espagnol, ce qui porte le terrible bilan à 33 marins disparus et 5 autres péris.

Les causes du naufrage ne seront jamais clairement établies, la plus probable étant une rupture des panneaux de cale en bois, due au poids excessif du chargement de nickel, ou encore un possible ripage de la cargaison. D'autres causes plus ou moins fantaisistes furent également évoquées comme le tir d'un missile à partir du centre de tir des Landes.

Des procès suivirent ce drame où la compagnie des Messageries Maritimes essaya de se défausser en voulant rejeter la faute sur le commandant Le Bel et son équipage, accusés de n'avoir pas pris les mesures adéquates pour arrimer et répartir convenablement la cargaison. On aurait pu aussi se poser la question de savoir si un commandant de cargo avait toute latitude pour limiter le volume d'une cargaison et priver ainsi sa compagnie et ses commanditaires de substantiels bénéfices. L'affaire du Maori, comme bien d'autres affaires de ce type se termina par un non-lieu en 1978.

Les familles restèrent seules avec leur chagrin, et d'autres drames de la mer suivirent, et la course au profit continue…

Les victimes du drame du Maori sont:

Etat-major :
Yves Le Bel, commandant, marié, 2 enfants, 45 ans
Félix Véran, second capitaine, marié, 2 enfants, 37 ans
Hubert de Thy, lieutenant pont, marié, 26 ans
Aymeric de Saint Palais lieutenant pont, 27 ans
Charles Martin, chef mécanicien, marié, 2 enfants, 40 ans
Henri Rupin, second mécanicien, marié, 2 enfants, 36 ans
Edouard Ricard, lieutenant mécanicien, marié, 50 ans
Gilbert Denis, lieutenant mécanicien, 24 ans
Francis Haas, officier radio, 39ans
Daniel Puel, élève radio, 17 ans.

Equipage :
Jackie Bodo, maître d’équipage, marié, 3 enfants, 35 ans
Albert Vitali, second maître, marié, 1 enfant, 54 ans
Alexis Kernoa, charpentier, marié, 3 enfants, 43 ans
Roland Jobin, capitaine d’armes, marié, 52 ans
Roger Guillou, matelot, marié, 2 enfants, 42 ans
Eugène Habada, matelot, 26 ans
Jean Claude Le Guilcher, matelot, 36 ans
Raphaël Sidi Ali, matelot, 19 ans
François Couric, matelot, marié, 32 ans
Christophe Congre, matelot, marié, 2 enfants, 31ans
Michel Brunot, matelot, marié, 2 enfants, 49 ans
André de Boisvilliers novice pont, 18 ans
Joseph Valéry, électricien, 46 ans
Henri Henric, ouvrier mécanicien, marié, 2 enfants, 34 ans
Yves Le Manchec, graisseur, 38 ans
Jean Prioux, graisseur, marié, 2 enfants, 41 ans
Jean Vince, graisseur, 46 ans
Robert Quéré, graisseur, marié, 1 enfant, 23 ans
Djama Hadj Ibrahim, nettoyeur, 1 enfant, 46 ans
Ben Ali Amady, nettoyeur, 2 enfants, 44 ans
Jean-François Mary, novice machine, 17 ans
Pierre Monnier, intendant, marié, deux enfants, 45 ans
Guy Lorand, chef cuisinier, marié, 1 enfant,28 ans
Amani Assoumani, garçon, 5 enfants, 39 ans
Guy Jegou, garçon, marié, 4 enfants, 50 ans
Idjihadi Madi, garçon, 3 enfants, 32 ans
Aboudou Ibouroy, garçon, marié, 34 ans
David Achy, postal, marié, 4 enfants, 51 ans

 

Sources :

Sources : divers web – coupures de presse "Le Marin"

site web : "MS-Maori"

Photo : Roland Grard

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