Amérique - Patrouilleur auxiliaire

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Le chalutier à vapeur Amérique de l'armement Poret Lobez & Compagnie, de Boulogne avait été réquisitionné le 11 décembre 1914 par l'état français, pour les besoins de la marine nationale pendant la durée de la guerre contre l'Allemagne.

Un équipage avait été désigné sous le commandement de l'enseigne de vaisseau de 1re classe de réserve Joneaux Léon André, pour prendre possession du bâtiment, et l'acheminer à l'arsenal de Cherbourg pour transformation en aviso auxiliaire. Ce chalutier à coque acier avait été construit en 1909 au chantier naval Baheux et frères à Boulogne. Il s'agissait à cette époque du plus grand navire construit par ce chantier. Il était francisé à Boulogne en 1912 sous le n° 44267. Il porte le n° B 85 sur sa coque.

Ce chalutier de haute mer de type "drifters" faisait la pêche aux filets dérivants pour capturer le poisson de marée (hareng et maquereau) et la morue. Ses dimensions étaient les suivantes : 46,30 m de longueur, et 7,40 m de largeur. Sa capacité d'emport était de 458 tonneaux de jauge brute (soit 1300 m3 environ). Il était propulsé par une hélice axiale, entrainée par une ligne d'arbre et une machine alternative à vapeur à triple expansion. La vapeur était produite par deux chaudières à charbon pour la propulsion et les auxiliaires de bord.

L'équipage, placé sous l'autorité de l'enseigne de vaisseau Joneaux était composé de marins des équipages de la flotte et d'inscrits maritimes mobilisés pour la durée de la guerre. A l'arsenal de Cherbourg, l’équipage avait pour mission de suivre et de réceptionner les travaux de transformation qui consistaient à l'installation d'un canon de 47 mm sur la plage avant, à l'aménagement de locaux de stockage de munitions, à l'installation de moyens radio (TSF) et à l'aménagement de locaux supplémentaires pour loger les personnels.

Par décret du 10 août 1915, le chalutier Amérique était inscrit sur la liste des bâtiments de la flotte de la marine nationale comme aviso auxiliaire, ayant Cherbourg comme port comptable (J.O. 11 août 1915, p. 5.579). Par le même décret, l'enseigne de vaisseau de 1re classe de réserve Joneaux Léon André était nommé commandant de l'aviso auxiliaire Amérique (J.O. 12 août 1915, p. 5.587).

Le bâtiment avait séjourné dans les eaux du Cameroun du 19 septembre 1915 au 23 avril 1916. Le commandant et son équipage avaient reçu un témoignage de satisfaction du ministre de la marine en ces termes "A rendu au Cameroun des services distingués. N'a cessé de donner l'exemple d'un entier dévouement pendant six mois de campagne, au blocus du Cameroun, sous un climat pénible". Par circulaire du ministre de la marine en date du 15 septembre 1916 tous les membres de l'équipage avaient été autorisés à porter la médaille coloniale avec agrafe "Afrique Équatoriale Française" : (B.O. Marine n° 27 / 1916, p. 244).

En avril 1916, l'enseigne de vaisseau Pineau Maurice prend le commandement du bâtiment qui est alors désigné patrouilleur auxiliaire et intègre la flottille des patrouilleurs de l'Océan basée au port de Brest. Les patrouilleurs ont pour mission d'escorter les convois en Atlantique entre les ports de Saint-Malo et de La Rochelle. L'enseigne de vaisseau Pineau avait été cité à l'ordre de la Division des patrouilleurs de l'Océan le 17 décembre 1916, pour avoir fait preuve, le 24 octobre et le 4 décembre 1916, au cours de deux attaques contre des sous-marins, de qualités de sang-froid et d'énergie. A sauvé, par son intervention deux vapeurs attaqués par l'ennemi.

Circonstances de la disparition du patrouilleur Amérique

L’Amérique quitte le port de Brest le 22 mars 1917 pour se rendre à Belle-Ile afin d’assurer la protection des convois au mouillage du port du Palais en remplacement de la canonnière affectée à ce service. Le 23 mars à 15 h 00, il envoie un message pour signaler l'arrivée le 24 mars du dragueur-canonnière Espiègle de la division Gascogne. Le 24 mars à 15 h 00, le patrouilleur signale par la radio qu'il fait route pour rentrer à Brest le 25 mars au matin afin d'entrer au bassin de radoub le 26 mars. Entre 16 h00 et 18 h 00, le patrouilleur est vu dans l'ouest-sud-ouest de Penmarch par la section des torpilleurs numérotés 367 et 324, faisant route nord-ouest. Le 24 mars à 16 h 00 l’Amérique reçoit un message TSF lui signalant que le bassin ne sera pas libre avant le 28 mars. Il reçoit alors pour consigne de sa division de prendre croisière sur la côte nord Bretagne, de l’île Vierge à Bréhat. A partir de ce moment 18 h 00, l’Amérique ne répond plus.

Les recherches entreprises le 25 mars par les contre-torpilleurs Gabion de Brest et le Claymore de Belle-Île étaient restées infructueuses. N’ayant aucune nouvelle, il avait été demandé à tous les sémaphores des 2e et 3e arrondissements s’ils avaient vu le patrouilleur Amérique depuis le 24 mars à 16 h 00. Les réponses avaient été négatives. Les recherches s'étaient poursuivies les 26, 27 et 28 mars, et aucune épave pouvant donner des indices n’avait été trouvée. Le commandant de la division des patrouilleurs de l'Océan avait estimé que le patrouilleur auxiliaire Amérique s’était perdu corps et biens dans la nuit du 24 au 25 mars, après 18 h 45, soit par torpillage, soit ayant sauté sur une mine, soit suite à un abordage.

En fait le commandant du sous-marin allemand U36 avait déclaré dans son rapport de mer avoir torpillé un navire d'environ 2000 tonnes, coulé le 24 mars 1917 à 20 h 25 au sud du Raz de Sein par une torpille tirée à une distance d'environ 300 mètres. Le navire, qui n'avait pas été identifié, avait coulé en quelques secondes.

Le 9 mai 1917, le torpilleur 275 avait trouvé en mer, à six milles du cap de la Chèvre, le cadavre d’un marin noyé. Le corps paraissait être celui du second maître mécanicien temporaire Deshayes, du patrouilleur Amérique, dont on était sans nouvelles depuis le 24 mars. Le nom "Deshayes" écrit à l’encre sur la ceinture d'un sous-vêtement était la seule marque d'identification. Un acte avait été dressé le 14 mai 1917 à la mairie de la ville de Brest sur les registres de décès. Il ne s'agissait pas d'un acte de décès car l'identité du défunt n'avait pas être établie. Le corps avait été inhumé au cimetière de Kerfautras à Brest.

Un jugement rendu le 29 mai 1918 par le Tribunal civil de Brest avait déclaré constant le décès, morts pour la France, des vingt-six membres de l'équipage du patrouilleur Amérique sur lequel ils étaient embarqués lors de la perte du bâtiment en mer entre La pointe de Penmarch et le goulet de Brest le 24 mars 1917. Le jugement avait été transcrit le 18 juin 1918 sur les registres d'état civil de la Mairie de Brest.

Par décision parue au JO du 15 octobre 1919, le chalutier Amérique avait fait l'objet de la citation suivante à l'ordre de l'Armée : "Le chalutier Amérique disparu corps et biens le 24 mars 1917 au cours d'une patrouille." Par arrêté ministériel du 20 février 1920, l'enseigne de vaisseau Pineau avait été nommé chevalier de la Légion d'honneur à titre posthume. Il avait été cité à l'ordre de la division des patrouilleurs de l'Océan le 17 décembre 1916. Cette citation comportait la croix de guerre avec étoile d'argent.

Par arrêté du Ministre de la Marine du 4 janvier 1922, vingt-cinq membres de l'équipage du patrouilleur auxiliaire Amérique, disparus en mer lors de la perte du bâtiment sur lequel ils étaient embarqués avaient été inscrits au tableau spécial de la médaille militaire, à titre posthume. Ils étaient cités à l'ordre du régiment en ces termes : "Glorieusement engloutis avec le patrouilleur Amérique, coulé sur une mine le 24 mars 1917". Cette citation comportait la Croix de guerre, avec étoile de bronze.

Sources :

  • Le dictionnaire des bâtiments de guerre de la flotte française Tome 2
  • Forum Pages Guerre 14-18 – Patrouilleur auxiliaire Amérique
  • Journal officiel du 12 juin 1916, ( 5.232) - Témoignage de satisfaction
  • Transcription jugement du 18 juin 1918 (Acte n° 1345)
  • Citation à l'ordre de l'Armée du chalutier Amérique (JO du 15 octobre 1919) :
  • Journal officiel du 12 janvier 1922-, (Pages 602) -
    25 membres de l'équipage, citation et Médaille militaire :
  • Journal officiel du 22 décembre 1920. (Page : 2987) :
    EV Pineau citation et Légion d'honneur
  • Le journal Le Radical du 20 décembre 1916 sur Gallica :
  • Histoire de Boulogne-sur-Mer

 

https://forum.pages14-18.com/viewtopic.php?t=43448

- https://gallica.bnf.fr/ark:/12148/

- https://archives.mairie-brest.fr/4DCGI

https://gallica.bnf.fr/ark:/12148/bpt6k6382757z?

https://books.openedition.org/

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