Dick - Bateau-feu

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Un bateau-feu, ou bateau-phare, est un navire stationnaire qui est équipé d’un mât tubulaire avec en son sommet un phare qui, en éclairant de son faisceau, la nuit, permet de signaler un danger pour la navigation. Ces bateaux étaient mouillés en mer, au moyen d'une ancre spéciale, à proximité de hauts-fonds dangereux dont ils signalaient la présence. Ils se trouvaient également aux embouchures des fleuves et dans les passes navigables où il était difficile d'aménager un phare pour délimiter un chenal par manque de fond rocheux. Certains étaient maintenus et manœuvrés par un équipage, d'autres, à fonctionnement automatique, étaient mouillés comme des bouées.
En 1933, dans le Pas de Calais, trois bateaux-feux sont mouillés pour signaler les bancs de sable dans les parages de Gravelines : le Ruytingen, le Sandettié et le Dick, chacun portant le nom du banc de sable qu’ils signalent.
Ce mercredi 13 décembre 1933, le temps est particulièrement mauvais, le vent souffle à plus de cent kilomètres heure en soulevant des vagues énormes, la température extérieure descend à moins 10 degrés. Les conditions en mer sont épouvantables, et à bord du Dick, isolé en pleine mer, sept hommes attendent que la tempête se calme. Malgré tout, durant la journée, le Dick a plus ou moins étalé les assauts des vagues, quand, vers 16h15 une grande secousse remue tout le navire. Lors d’un coup de bélier d’une lame plus agressive, la chaîne de mouillage se rompt au niveau de l’écubier. Le bateau-feu commence alors à dériver.
L’équipage, rompu à ce genre d’incident, le dernier remontant au 4 décembre dernier, descend sur le pont et courageusement commence à filer les deux cent-vingt-cinq mètres de chaîne de l’ancre de veille. Opération pénible et dangereuse compte tenu des conditions météorologiques exécrables, mais qui devrait permettre de stopper la dérive et retrouver un mouillage. Au sémaphore de Grand Fort Philippe les guetteurs suivent les opérations attentivement.
Une demi-heure plus tard, second coup du sort : la nouvelle chaîne se rompt à son tour. Les hommes du Dick se remettent aussitôt à l’ouvrage car la situation devient critique, mais alors qu’un troisième mouillage est en préparation, le bateau-feu talonne. Les lames commencent à déferler, l’eau s’engouffre dans la cale, le phare s’éteint, chacun se prépare au pire ; les guetteurs du sémaphore ont donné l’alerte et les dispositifs de sauvetage de Gravelines, Dunkerque et Calais se mettent en branle pour porter assistance au Dick.
Le canot de sauvetage de Gravelines, l’Amicia II est le premier à prendre la mer, mais après deux heures de vaines recherches, sous la furie des éléments, il doit renoncer sous peine de perdre tous ses canotiers, et la mort dans l’âme l’Amicia II regagne Gravelines guidé par le projecteur du sémaphore.
Pendant ce temps à bord du Dick c’est la débâcle, quatre hommes ont déjà disparu et les trois restant se battent avec l’énergie du désespoir pour ne pas périr dans cette mer déchaînée.
Le Maréchal Foch, canot de Calais, arrive sur zone et, va en compagnie du remorqueur Hercule se dépenser sans compter, toute la nuit pour tenter de passer un filin aux naufragés du bateau-feu. L’objectif étant de mettre en place une poulie et un cartahu qui permettrait d’évacuer les trois hommes du Dick. Hélas, la mer sera encore la plus forte et les câbles se rompent, le Maréchal Foch doit à ce moment retourner sur Calais pour rembarquer du matériel de sauvetage.
Heureusement, après tous ces échecs propres à décourager le plus déterminé des sauveteurs, le salut viendra du rivage et les trois rescapés pourront regagner la terre ferme, épuisés mais sauvés.

Sources :

Les grandes catastrophes maritimes (1900-1945)
de Michel Giard – Editions Pascal Galodé

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