John Joseph Gabriel O'Byrne
est né le 20 février 1878 à Rabastens (Tarn (81))
Elle est surprenante cette rue Gabriel O’Byrne, lieutenant de vaisseau, dans la petite ville de Rabastens, située à l’intérieur des terres, près de Toulouse et pourtant y est né un grand marin qui s’est illustré durant la Première Guerre Mondiale à bord du sous-marin le"Curie".
Gabriel O’Byrne naît à Saint Géry le 20 février 1878, quatrième enfant d’Henry O’Byrne, d’origine irlandaise et d’Elizabeth du Bourg, descendante d’une très ancienne famille toulousaine.
Il entre à l’Ecole Navale de Brest en 1896 et en sort enseigne de vaisseau en 1899. Il embarque à bord du "Charles Martel" puis participe à une expédition de la guerre des Boxers en mer de Chine sur le croiseur "Friant" en 1900.
Enseigne de vaisseau de 1ère classe en 1901, il sert successivement sur les cuirassés "Charlemagne" et "Suffren" et sur le croiseur "Linois".
En 1904, Il épouse Marguerite de Gaudemaris avec laquelle il aura six enfants.
En 1907 il est affecté sur le torpilleur "La Bourrasque", basé à Toulon, comme officier en second. Lieutenant de vaisseau le 11 mars 1910, il prend le commandement du sous-marin "Anguille". Très intéressé par la nouvelle technologie, il est choisi, en 1912, pour prendre le commandement du sous-marin "Curie" en cours de construction à l’arsenal de Toulon, dont il surpervise la finition.
Il faut imaginer ce que pouvait être un sous-marin en 1912, les risques encourus par l’équipage, le courage, la volonté et l’intelligence qu’il fallait avoir pour choisir cette nouvelle arme.
A cette époque, son camarade à Navale, l’écrivain Paul Chack qui a navigué durant cinq années avec lui, le décrit ainsi :
"A 35 ans, O’Byrne est un géant tranquille, taillé sur un gabarit de latin mêlé d’Irlandais. Des yeux de bonté et de franchise animaient sa face colorée au front et aux pommettes puissantes, à la mâchoire de combat. Agile et vif malgré son aspect un peu lourd, le commandant du "Curie" était silencieux et réservé".
Quelques temps avant la déclaration de la guerre 14-18, le "Curie" quitte le port de Toulon pour rejoindre l’escadre basée à Bizerte, en Tunisie, où le rejoint sa famille.
Le 13 août 1914, alors que la guerre vient d’être déclarée, sa femme écrit à sa belle-mère : "L’escadre est en route pour attaquer les ports autrichiens et ce sont les sous-marins qui vont marcher à fond pour obliger leurs bateaux à sortir". Mais cette opération ne va se dérouler que plus tard, le sous-marin, victime d’une avarie, revient au port de Bizerte pour réparation.
John part le 13 décembre pour Malte puis pour Pola, petit port situé derrière l’île mythique d’Ithaque où il rejoint le croiseur "Marceau". Le "Curie" a pour mission d’attaquer la flotte autrichienne réfugiée dans ce port qui appartient à l’empire austro-hongrois. Ce port est une véritable forteresse encadrée de montagnes truffées d’artillerie, protégée par des barrages de filets d’acier. La mission que l’on a confiée au commandant du "Curie" est très difficile, d’autant que les sous-marins ne disposent pas de moyens de détection très perfectionnés et doivent refaire surface pour recharger les batteries.
Le 16 décembre 1914, en dépit de toutes ces difficultés, Gabriel O’Byrne entraine son équipage avec courage dans cette mission. Mais le bateau est pris dans les filets et s’enfonce, malgré cinq heures d'efforts pour le dégager. Debout sur le pont avant du bâtiment, le commandant dit adieu à ses hommes : "Courage mes enfants, c’est pour la France", leur lance-t-il, avant d'être touché par cinq éclats d'obus dans les jambes et quatorze dans tout le corps. Le feu cesse, des embarcations autrichiennes viennent recueillir l’équipage, deux marins meurent de leurs blessures. O’Byrne, grièvement blessé, passe une heure dans une eau glaciale avant d’être recueilli et ramené sur le navire autrichien "Viribus unitis" vers 20 heures. Impressionné, l’équipage du bateau salue les marins du "Curie". Le commandant est emmené à Graz et enfermé au secret. Une blessure sérieuse au poumon aggravée par son séjour dans l’eau met ses jours en danger, il est opéré, sans succès.
Le 8 mars, son épouse quitte Bizerte et rentre chez ses parents à Grenoble. Gabriel O’Byrne a de nouveau été opéré en Autriche où il a été transporté. Inquiète pour la santé de son mari, elle est décidée à tout faire pour aller le voir à Graz. Début juin 1915, elle obtient l’autorisation tant désirée et voit son mari deux heures par jour. Fin janvier 1917, très malade, Gabriel O’Byrne est échangé contre un officier autrichien ; il arrive à Montavit, près de Grenoble chez les parents de sa femme. Il y meurt le 24 mars 1917. Son corps est ramené à Saint-Géry où il est enterré parmi les siens. Il a trente neuf ans.
Le contre-amiral Boué de Lapeyrière déclare : "Ce deuil est aussi celui de la Marine française où notre héros ne compte que des admirateurs. Son nom restera parmi nous comme un symbole d’abnégation et de superbe courage".
Un sous-marin portant son nom est lancé en juin 1919.
En 1924, le maire de Rabastens donne son nom à une rue du village où vivent sa femme et ses enfants.
La même année a lieu à Toulon une cérémonie franco-italienne avec restitution de quelques objets du "Curie" ; au cours de la cérémonie, le ministre italien déclare : "Sans les O’Byrne, sans les Rizzo qui réussirent à couler en 1918 ce "Viribus unitis" qui avait échappé au "Curie", sans les 1000 héros de la guerre, l’Italie n’aurait pas encore ses frontières naturelles". Au cours de cette cérémonie, Marguerite O’Byrne et ses deux fils reçoivent la médaille d’or Ad valorem, la plus haute distinction italienne.
Son petit-fils Gabriel O’Byrne a choisi, lui aussi, de servir la France dans la Marine nationale. A sa sortie de Navale, il opte, lui aussi pour les sous-marins. Il a été second sur le bathyscaphe F.N.R.S. pour prendre part aux plongées au large du Japon. Trois ans plus tard, lieutenant de vaisseau, il est commandant du bathyscaphe "Archimède" qui descend à 9500 mètres dans la fosse des Kouriles au large du Japon, devenant l’un des hommes les "plus profonds du monde".
Il décède en 2004 et repose à Saint-Géry aux côtés de son grand-père.
Documentation :"L'écho du pays rabastinois" n°240
"Histoire des marins français 1870-1940" Contre Amiral Hubert Garnier
- Légion d'Honneur (chev.)
- Citation à l'Ordre de l'Armée de Mer
Curie
Le sous-marin "Curie" (Q-87) fait partie de la série des bâtiments type Brumaire, ordonnée à l’été 1905 en même temps que la série des Pluviôse, mais à moteur diesel. D’un déplacement en plongée de 550 tonnes, d’une longueur hors tout de 52,15 m, les Brumaire pouvaient atteindre 13,1 nœuds en surface.
Construit à l’arsenal maritime de Toulon, le...