Le LCI 9050 était un engin de débarquement de troupes d'infanterie (Landing Craft Infantry) formant bâtiment de commandement de la division navale d'assaut n° 6 (DNA 6) basée à Vinh Long sur le fleuve Mékong en Indochine.

Ce type d'engin avait été construit aux Etats Unis d'Amérique dans le cadre du programme de préparation du débarquement des troupes alliées en Europe en 1944. Un très grand nombre d'unités avait été construit selon différents modèles par ordre décroissant de tonnage : LST, LCT, LCI, LCM, LCA et LCVP.

Conçus initialement par la société britannique Thornycroft, des LCI avaient été commandés par le Royaume-Uni et les USA. 1098 engins LCI avaient été construits à partir de 1942 dans dix chantiers navals répartis sur les trois côtes des États-Unis (Pacifique, Atlantique et golfe du Mexique), en 2 séries de base :

Une 1^re série du n° 1 au n° 250, puis une 2^e série du n° 251 au n° 540. A partir du LCI 251, une passerelle arrondie avait été intégrée dans le poste central agrandi permettant d’installer aux 4 coins des baignoires de tir pour canons de 20 mm et mitrailleuses. Puis à partir du LCI n° 691, les rampes de débarquements latérales avait été abandonnées, car trop vulnérables. Le débarquement des troupes se faisait alors par un ensemble de porte et de rampe aménagé dans la proue.

Caractéristiques de la première série

Le LCI de type 1 avait un déplacement lège de 216 tonnes. Il mesurait 48,30 m de longueur, 7,10 m de largeur, et 1,80 m de tirant d'eau. Il était propulsé par deux hélices entrainées chacune par une ligne d'arbre accouplée à quatre moteurs diesel Gray Marine de 225 ch chacun, couplés et synchronisés. Les hélices à pales orientables permettent une inversion pour la marche arrière. La puissance installée de 1800 ch lui permet d'atteindre la vitesse maximale de 12 nœuds. L'énergie électrique pour les besoins du bord était produite par deux groupes électrogène.

Il était armé à l'origine d'un canon de 40 mm Vickers et trois canons de 20 mm Oerlikon.

Il était aménagé pour pouvoir accueillir un équipage de 30 personnes et transporter dans trois cuves une compagnie d'infanterie de 200 hommes.

Le bâtiment avait été conçu pour pouvoir débarquer ses passagers sur une plage à marée montante (beachage ou plageage), ou par échouage sur une plage à marée descendante, par l'intermédiaire de rampes disposées sur les côtés à l'avant du navire. Les hélices de faible diamètre, installées sous des voutes, ne dépassaient pas la ligne de quille lors de l'échouage sur une plage.

Origine des LCI des forces amphibies d'Indochine

Lors de la conférence de Posdam (Allemagne) en juillet 1945, les trois puissances victorieuses de l'Allemagne, alors que le Japon n'avait pas encore capitulé, avaient fixé le sort des belligérants qui restaient encore en guerre contre les alliés. Concernant l'Indochine française, intégralement contrôlée par les japonais depuis le coup de force du 9 mars 1945, les alliés avaient décidé de confier le rétablissement de l'ordre et le désarmement des japonais, au Royaume-Uni pour la partie située au sud du 16^e parallèle, et à la république de Chine pour la partie nord.

Les premiers éléments des forces britanniques, commandés par le Général Gracey, composés de 7^e et la 20^e division indienne, étaient arrivés en septembre 1945 par voie aérienne à Saïgon venant de Birmanie. Les bâtiments de la Royal Navy, comprenant une frégate, neuf dragueurs de mines et des engins de débarquements type LCT et LCI étaient arrivés à Saïgon quelques jours plus tard. Le cuirassé Richelieu et le croiseur Triomphant de la marine française, qui avaient pris part en avril et mai 1945 à l'opération "Dracula" à Rangoun en Birmanie, sous commandement britannique, étaient arrivés au cap Saint-Jacques en Indochine le 3 octobre 1945. Ils escortaient les paquebots Princess-Béatrix et Quenn-Emma, avec à leur bord les premiers éléments (le 5^e Régiment d'infanterie coloniale et les parachutistes du colonel Massu) du corps expéditionnaire français commandé par le Général Leclerc. Celui était placé sous les ordres du Général Gracey. Le cuirassé Richelieu transportait le commando marine du CC Ponchardier. Le reste du corps expéditionnaire comprenait la 9^e division d'infanterie coloniale

La Royal Navy avait prêté à l'Etat français huit LCI et d'autres engins de débarquement pour armer une flottille fluviale. Il s'agissait des LCI 117, 174, 216, 249, 262, 293, 305 et 310.

Le 12 octobre 1945, le Général Leclerc avec ses 4500 hommes avait été chargé de mener une campagne militaire de pacification autour de Saigon. Les routes et les ponts étant coupés, les troupes avaient embarquées sur des LCI et autres engins de débarquement manœuvrés par les marins de la marine nationale. Le commando du CC Ponchardier et la compagnie du LV Merlet avaient repris la ville de Mytho par surprise le 25 octobre 1945, puis celle de Vinh-Long et celle de Cantho avait été prises 5 jours plus tard.

A toutes ces opérations, les Anglais, agissant en pleine confiance avec le commandement français, avaient pris une part très active. Il était temps de mettre un terme à cette situation anormale. L'Amiral Mountbatten, commandant des forces britanniques en Asie du sud-ouest, était impatient de ramener ces troupes en Inde ou en Malaisie dès que les français seraient en nombre suffisant pour assumer la tâche. Au fur et à mesure de l'arrivée des unités de 9^e division d'infanterie coloniale (9^e DIC), les français avaient pris le contrôle de la région Saïgon – Cholon - Nhabé. Le 31 décembre 1945, le Naval Officier in Charge (commandement britannique de la marine) avait quitté Saïgon. A partir du 15 janvier 1946, le général Leclerc avait assumé seul la responsabilité des opérations en Indochine-sud, sous les ordres du haut-commissaire.

Le capitaine de frégate Jaubert avait été chargé de mettre en place une flottille fluviale pour les opérations de réimplantation et de sécurisation de la Cochinchine. Il avait récupéré tout ce qui flottait à Saïgon, dont tous les engins de débarquement pris aux japonais. Les huit LCI britanniques avaient ensuite été achetés par l'état français au Royaume-Uni. En 1946, ils avaient été numérotés par la marine nationale : LCI 101 (ex 216), LCI 102, (ex 117), LCI 103 (ex 305), LCI 104 (ex 293), LCI 201 (ex 262), LCI 202 (ex 310), LCI 203 (ex 249), LCI 204 (ex 274).

Le 15 février 1946, la flottille fluviale avait été organisée ainsi : - La 1^re flottille fluviale de fusiliers marins (FFFM) qui servira au Tonkin ;

- La 2^e FFFM qui restera en Cochinchine.

Six autres LCI (Les n° 109, 217, 263, 270, 271, 299) avaient été achetés aux surplus américains à Manille. Escortés à Saigon par l'aviso Tonkinois, ils étaient arrivés dans ce port le 2 mai 1946. Sur les 14 navires réceptionnés, certains étaient en mauvais état. Six seulement purent être armés, les autres servirent de casernement et de stock de rechanges.

Le 1^er janvier 1947, les deux flottilles avaient été réorganisées en Force Amphibie de la Marine en Indochine, répartie en deux groupes : La FAIN au nord, et la FAIS au sud.

En août 1947, une organisation plus formelle entre les unités de l’armée de terre et la marine nationale avait été mise en place. Les unités navales étaient devenues divisions navales d’assaut, ou DINASSAUT. Le rôle de ces "Dinassaut" était de transporter, de débarquer et d'appuyer l’infanterie et aussi de surveiller les cours d’eau et de ravitailler les postes isolés.

Chaque DINASSAUT comprenait :

- un LCI (LSIL de 1951) pour le commandement et l'appui

- un LCT pour le transport de troupes

- deux LCM pour le transport et l'appui

- quatre LCVP (2 unités de 2 pièces, parfois remplacé par LCA), pour les patrouilles et le soutien

- un bateau de patrouille/liaison (LCVP, vedette ou LCA)

- autres bateaux (tels que LSSL, hydravions, etc.), et troupes navales de commandos ou d'armée furent ajoutés pour des tâches spécifiques.

Achat de quatre unités au Royaume-Uni en 1948 dont le LCI n° 508

Quatre nouvelles unités avaient été achetées en Grande Bretagne par l'état français. Elles avaient été prises en charge par des équipages français dans le port de Southampton. Il s'agissait du LCI n° 108, en octobre 1948, du LCI n° 508 en novembre 1948, et des LCI n° 251 et 260 en octobre 1949.

L'USS LCI(L) 508 de l'U.S Navy avait été construit en novembre 1943 et livré à la Grande Bretagne. Il participa au débarquement de Normandie de juin 1944 (opération Overlord), avant de rejoindre la Royal Navy en décembre 1944.

L'exemplaire n° 508, d'abord affecté à la base navale de Bizerte en Tunisie, avait subi quelques modifications. Son armement comprenait : un canon de 40 mm implanté sur la plage avant, un canon de 75 mm sur Spardeck, 4 canons de 20 mm (2 à l'arrière, 2 sur le Spardeck), 2 mitrailleuses de 7,62 mm à la passerelle, 1 mortier de 81 mm à l'arrière, et deux mortiers de 81 mm. Il avait rejoint Saïgon en juin 1949, escorté par l'aviso "La Grandière". Affecté à la Dinassaut n° 6 implantée à Vinh Long, il servait de bâtiment de commandement et d'appui feu.

Les LCI de la Marine nationale avait été équipés de moyens de transmission radio et en 1950 d'un radar de navigation.

Les LCI de la Marine nationale

En 1951, les LCI avaient tous été renommés pour porter un numéro OTAN. Le LCI 508 avait été renommé LCI 9050. Le LCI 9050 avait pris part à de nombreuses opérations en Cochinchine, sur le fleuve Mékong et dans la plaine des Joncs : en juin 1950, l'opération "Pastis" sur le Song Cai Lon, l'opération "Normandie" entre Mékong, King Tong Loc et Cai Nua, en juillet 1950, le dégagement de la région Cai-Mon, l'opération "Ramadan", l'opération "Tulipe" à l'extrémité du Cis-Bassac, et l'opération "Mercure", en novembre 1950, l'opération "Prétexte" de nettoyage des rives du Mékong, au 2^e et 3^e trimestre 1951, les opérations "Orage' et "Tourbillon", au sud de la plaine des Joncs, en octobre 1951, à l'opération "Couronnement" dans le secteur du Bassac. En 1952, les engins des postes de Vinh Long participèrent à de nombreuses opérations de secteurs pour étendre les zones contrôlées. L'année 1953 voit reprendre les grandes opérations d'implantation de postes en bordure de la plaine des Joncs et dans la presqu'île de Camau.

En 1952, LCI n° 476, nommé "Médecin Capitaine Le Gall" était arrivé en Indochine. Il était spécialement aménagé pour servir de navire hôpital.

Le 3 avril 1953, la Dinassaut n° 6 reçut pour mission de transporter une compagnie de la légion étrangère qui devait opérer dans la plaine des Joncs. Le LCI 9050 était accompagné du LCT 9086 et divers engins de débarquement LCM et LCVP. L'unité d'infanterie avait été déposée en fin d'après-midi au kilomètre 90 du canal commercial Tong Doc Loc, qui relie Saïgon à Phu My, près du village de My Thien où se trouvait le marché 17. Après avoir déposé les fantassins, les bâtiments avaient mouillé sur ancre pour passer la nuit au mouillage en attendant le retour des fantassins, le lendemain. Vers minuit trente le LCI 9050 saute sur une mine immergée qui provoque un incendie à bord. Le sinistre fit 21 morts et 10 blessés parmi les membres de l'équipage. Certains marins décédèrent sur le coup, mais d'autres succombèrent à l'hôpital militaire Médecin commandant Le Flem à Cholon des suites de leurs brulures. Le bâtiment fut renfloué et remorqué à Mytho, puis fut désarmé en avril 1954 à Saïgon.

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